La Planche de Galton : le groupe est prévisible
Si on ne peut pas prédire un comportement individuel, on peut souvent prédire celui du grand nombre. Cet article est complémentaire à : Des Statistiques et des Humains (Evoweb 10 mars 2000)1
La sensibilité aux conditions initiales
Imaginez une boule de billard lancée sur la pointe d'un triangle, qu'on imagine suffisamment fine pour que la boule soit obligée d'aller d'un côté ou de l'autre et ne puisse pas y rester bloquée. Selon le point précis auquel elle touchera la pointe, sa trajectoire ira d'un côté ou de l'autre. C’est-à-dire que le résultat obtenu sera totalement opposé en fonction de minuscules variations des conditions initiales.
Imaginez maintenant qu'il n'y a pas qu'un seul triangle, mais plusieurs successifs qui à chaque fois décident de la trajectoire suivie par la boule :
- Vous ne pouvez évidemment pas prévoir où va arriver une boule.
- Mais vous pouvez prévoir la distribution que représenteront un grand nombre de boules : une courbe en cloche
La planche de Galton
C'est ce qu'on appelle la Planche de Galton, hormis que celle-ci utilise des clous plutôt que des triangles, et des billes plutôt que des boules de billard. Wikipedia FR la définit ainsi :
Une planche de Galton est un dispositif inventé par Sir Francis Galton qui illustre la convergence d'une loi binomiale vers une loi normale.
Des clous sont plantés sur la partie supérieure de la planche, de telle sorte qu'une bille lâchée sur la planche passe soit à droite soit à gauche pour chaque rangée de clous. Dans la partie inférieure les billes sont rassemblées en fonction du nombre de passages à gauche et de passage à droite qu'elles ont fait.
Ainsi chaque case correspond à un résultat possible d'une expérience binomiale (en tant qu'une expérience de Bernoulli répétée) et on peut remarquer que la répartition des billes dans les cases approche la forme d'une courbe de Gauss, ceci étant d'autant plus vrai que le nombre de rangées augmente, autrement dit : la loi binomiale converge vers la loi normale. Il s'agit donc d'une illustration du théorème de Moivre-Laplace2.
Il existe plusieurs vidéos sur Youtube montrant des reproductions de la Planche de Galton, celle-ci (qui montre un objet en vente sur Amazon) me paraissant la plus explicite (48s) :
Applications
De nombreuses règles psychologiques suivent ce modèle : on ne sait pas si la personne va ou non surréagir à un stimulus, si elle va aller à droite ou à gauche, etc., alors que chacun de ces choix aura une influence déterminante sur le futur. Mais on sait est que sur le grand nombre, la distribution des réponses correspondra à une Loi Normale, et que si ce n'est pas le cas (ou si la courbe en cloche obtenue n'est pas centrée) c'est qu'il y aura eu des influences extérieures.
Le modèle n'est bien sûr pas parfait : les billes sont identiques, pas les humains, le comportement de chaque bille est indépendant de celui des autres, ce n'est pas le cas dans une société humaine, etc.
Et chez les humains, contrairement à la Planche de Galton, on peut influencer chaque "bille" pour qu'elle ait tendance à choisir un comportement plutôt qu'un autre, c’est-à-dire influer sur sa position finale.
Liens
Des Statistiques et des Humains. Gouillou, Philippe. Evoweb. 10 mars 2000
Wikipedia FR :
The Galton Board - YouTube. RandomStuff. 13 mars 2018
Amazon : Four Pines Publishing - Galton Board Desktop Probability Machine
Notes
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Résumé et sommaire :
Dès qu'on s'intéresse à l'origine génétique du comportement, on s'aperçoit que beaucoup de commentaires ne sont fondés que sur une mauvaise compréhension de certains concepts statistiques. Cette page n'a donc pour objectif que de les présenter... afin de répondre par avance aux critiques les plus fréquemment lues et entendues.
Corrélation ne signifie pas causalité - Le sens d'une causalité n'est pas toujours évident - Une personne est indivisible - Pourcentages d'origine génétique du comportement - Plus proche des chimpanzés que de nos parents ? -
Le théorème de Moivre-Laplace n'est qu'un cas particulier d'une Loi plus générale, le Théorème central limite, que Wikipedia FR définit comme :
Le théorème central limite (aussi improprement appelé théorème de la limite centrale ou centrée) établit la convergence en loi de la somme d'une suite de variables aléatoires vers la loi normale. Intuitivement, ce résultat affirme que toute somme de variables aléatoires indépendantes tend dans certains cas vers une variable aléatoire gaussienne.
©Philippe Gouillou - Lundi 16 septembre 2019