Hypothèse 88 : Islamophobie

©Philippe Gouillou - Samedi 17 août 2024

Tags : AnarchoTyrannie - Hypothèses - Jihad - Justice

Elle se demanda s'il avait collaboré pendant la guerre puis se rappela que c'était impossible, il était trop jeune.


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C'était son premier procès aux Assises, et c'était une affaire tragique, qu'une certaine presse nauséabonde cherchait à faire passer pour du terrorisme. Elle commença par résumer l'affaire pour les Jurés.

L'accusé était un homme blanc de 52 ans, Directeur Commercial d'une PME, sans antécédent judiciaire hormis quelques procès verbaux sans retrait de permis pour excès de vitesse. Il était bien habillé, cravatté, et parlait distinctement avec un bon niveau de langue. Les tests avaient montré un QI supérieur, dans les top 10% de la population. Les tests de biais implicite n'avaient rien détecté de particulier, ce qui pouvait être la preuve qu'il cachait bien son jeu. Il était en effet poli, courtois, et montrait même une distinction certaine. Il avait beaucoup travaillé pour arriver à ce niveau social et en profitait bien : s'il était encore en train de payer sa belle maison avec piscine, il roulait déjà en voiture allemande de luxe. Trop occupé par son travail, il n'était pas vraiment actif politiquement mais était inscrit dans une salle de sport, signe d'une orientation politique de droite. Elle insista sur le fait qu'il ne s'était jamais impliqué dans les associations d'aide aux migrants mais avait au contraire exprimé son soutien aux manifestations de l'été 2024 en Angleterre, soi-disant pour défendre la liberté d'expression. Elle se demanda s'il avait collaboré pendant la guerre puis se rappela que c'était impossible, il était trop jeune. Elle reprit. Elle signala que l'accusé avait été inscrit dans un club de tir pendant un an, dix ans auparavant, mais n'avait jamais demandé de port d'arme.

La victime, décédée, était racisée. Agée de 20 ans, elle était née en France, six mois après l'immigration de ses parents. Son casier judiciaire était rempli, dès 11 ans elle avait été arrêtée pour des violences et des vols, et à 16 ans pour sa participation à une tournante sur une fille mineure de 12 ans. Une bagarre au couteau, à l'âge de 17 ans, lui avait laissé une cicatrice sur le bras. N'ayant aucun diplôme, elle avait séché l'école dès ses 12 ans, elle ne faisait que "shouffer", c'est-à-dire surveiller l'arrivée de la police pour les dealers de son quartier. Sa famille et les médias la décrivaient comme un homme gentil, serviable, qui n'avait pas eu de chance et avait souffert du racisme. Elle montrait d'ailleurs la volonté de s'en sortir : depuis quelques mois elle s'impliquait plus dans la religion et faisait même ses cinq prières par jour.

L'affaire, que l'extrême-droite qualifiait honteusement d'"attaque jihadiste", s'était déroulée à la fin du mois de mars de l'année précédente. La victime, seulement armée d'un fusil à répétition Kalachnikov, de deux pistolets de marques différentes, et de quelques explosifs, avait crié "Allah Akbar" et tiré sur les Blancs du centre commercial du quartier, en tuant cinq et en blessant douze autres. Un policier était présent par hasard sur les lieux mais avait lui aussi été tué avant même de pouvoir tirer. L'accusé avait alors pris le pistolet de fonction du policier et avait abattu froidement la victime de 5 balles. L'enquête avait montré que le premier tir de l'accusé avait suffit à désarmer la victime sans être mortel, les autres tirs avaient donc été inutiles, or c'étaient eux qui avaient provoqué le drame. De plus, l'enquête avait aussi montré que la victime était en train de recharger son arme quand l'accusé l'avait abattue, ce qui prouvait qu'elle ne constituait pas un danger immédiat.

C'était au tour de l'interrogatoire de l'accusé. Elle trouva les questions des jurés peu pertinentes, on voyait qu'ils n'avaient pas de formation juridique, qu'ils ne savaient pas se concentrer sur l'essentiel mais au contraire se laissaient emporter par l'émotion. Par exemple, certains prenaient le fait que le propre fils de l'accusé avait fait partie des tués comme une circonstance atténuante, alors que ce ne pouvait être que le signe d'un tempérament vengeur, dangereux, indicateur d'un risque de récidive. Elle leur rappela donc que l'accusé avait répondu "Oui" à la question "Est-ce que l'immigration de masse peut provoquer une transformation du pays ?", question utilisée pour détecter le racisme, et "Non" à la question "Est-ce que l'Islam est compatible avec les Droits de l'Homme ?", question utilisée pour détecter l'islamophobie. Pour le reste, l'accusé ne faisait que répéter qu'il s'était senti en situation de légitime défense, et qu'il croyait que son action avait permis d'éviter beaucoup de morts, toutes choses que répètent ceux qui n'ont pas le niveau d'une compréhension juridique de ces dossiers.

C'était maintenant aux jurés de se retirer pour délibérer, il lui fallait leur synthétiser les éléments essentiels pour qu'ils se concentrent sur la question de droit. Elle remarqua à ce moment qu'un des jurés était un homme blanc, elle espéra que son racisme ne vienne pas troubler les délibérations. Elle insista donc sur le fait que les conditions nécessaires à l'exception de légitime défense n'étaient pas réunies, que l'inscription en club de tir pouvait être considéré comme un signe de préméditation, et que l'accusé n'avait même pas le droit de prendre l'arme du policier. Elle expliqua aussi que les opinions politiques et religieuses de l'accusé avaient pu être des éléments déclencheurs du drame et que son racisme et son islamophobie constituaient des circonstances agravantes. Et elle leur demanda de se rappeler la tragédie d'un Français victime tout au long de sa courte vie du racisme systémique pour finir, au moment même où il se tournait vers la religion, abattu par un mâle blanc de plus de cinquante ans.

Elle ne pouvait bien sûr pas prédire leur décision, mais elle était fière d'avoir réussi à leur transmettre les éléments objectifs pour qu'ils puissent débattre de l'affaire de manière apolitique.

Image : Kalachnikov AK-47 by Allatur. Licence CC-BY 3.0. Wikimedia Commons

©Philippe Gouillou - Samedi 17 août 2024


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Citation de cette page :

Gouillou, Philippe (2021) : "Hypothèse 88 : Islamophobie". Evoweb. Samedi 17 août 2024. https://evoweb.net/blog2/20240817-hypothese-88.htm
[Hypothèse 88 : Islamophobie](https://evoweb.net/blog2/20240817-hypothese-88.htm "Evoweb : Hypothèse 88 : Islamophobie (Samedi 17 août 2024)"). Philippe Gouillou. *Evoweb*. Samedi 17 août 2024