Concours de T-shirt mouillé
Cette femme gagne le concours de l'année : pour les autres, les vêtements mouillés qu'elles gardent pour se baigner ne mettent en relief que les débordements des amas graisseux mal répartis, et de la lingerie de bas de gamme.
La plage, en Tunisie. Une belle Européenne d'une quarantaine d'année porte une longue robe noire, en tissus léger synthétique : mouillée, elle lui colle à la peau, suit le relief du soutien-gorge à balconnet, montre les tétons qui pointent, et le ventre, le nombril. Cette femme gagne le concours de l'année : pour les autres, les vêtements mouillés qu'elles gardent pour se baigner ne mettent en relief que les débordements des amas graisseux mal répartis, et de la lingerie de bas de gamme.
De plus en plus de filles (dès le plus jeune âge) et de femmes (jusqu'aux écroulements de la vieillesse) se baignent habillées. Pour certains c'est le signe d'un retour du religieux, et pour d'autres du puritanisme pur et dur. Il me semble plutôt qu'il s'agit surtout d'une question de mode : les tissus des pareos, robes et T-shirts portés pour le bain sont choisis les plus fins et les plus transparents possibles, l'objectif n'est pas de cacher, mais au contraire de montrer encore plus, tout conservant ce positionnement madone qui augmente la valeur sur le marché du mariage. Les plus fortes à ce jeu sont bien sûr les torchonnées : leur voile leur offre cette supériorité morale qu'elles sauront exploiter en affichant leur mépris le plus intense pour celles qui n'en portent pas, tout en lançant des regards charmeurs à tous les hommes susceptibles de les intéresser.
L'Européenne au soutien-gorge à balconnet ne portait pas de hijab, contrairement aux femmes qui l'accompagnaient. Bien sûr, on peut considérer qu'elle était suffisamment belle et n'avait pas besoin d'un accessoire supplémentaire pour attirer les hommes. Mais il est possible aussi qu'elle portait cette robe par obligation, pour faire pudique, pour éviter d'être emmerdée, tout comme il est de plus en plus conseillé aux Parisiennes de ne surtout pas être sexy si elle veulent prendre le métro tranquilles. Une Européenne est généralement perçue comme une pute en Tunisie, et dans cette région on trouve en plus beaucoup de touristes sexuelles, Européennes d'un certain âge qui viennent se payer un ou des gigolos. Par sa robe, cette femme en noir se dés-européanisait, et évitait toute confusion. Peut-être sera-ce le conseil à préciser aux touristes qui viennent par ici, "baignez-vous habillée", et la plage ne sera plus qu'un immense étalage de T-shirts mouillés exhibant des corps difformes.
(Photo : Romain Cloff - Wikimedia Commons)
©Philippe Gouillou - 2 Août 2004